Full text: Contes choisis D'Andersen précédés d'un fragment du Conte de ma vie par le même, et d'une notice du traducteur

LE COMPAGNON DE VOYAGE, 161 
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être enterré le lendemain, Jean ne s’effraya nulle- 
ment de cet aspect, car il avait une bonne conscience 
et était persuadé que ce ne sont pas les morts qui 
font du mal aux honnètes gens, mais bien les mé- 
chants qui sont en vie. C’étaient à cette dernière 
classe qu’appartenaient deux hommes qui se tenaient 
des deux côtés du cercueil et se concertaient pour 
empécher que le defunt ne fut enterré en terre 
sainte. 
Jetons le à la voirie, disaient-ils, 
Pourquoi donc cela? objecta Jean, laissez les 
morts en paix au nom du Dieu de paix! 
Du tout, répondirent ces vilains hommes, il est 
mort sans laisser un sou, et il nous devait de lar- 
gent — nous voulons au moins nous venger et le 
jeter dehors comme un chien. 
Je n’ai que cinquante écus, dit Jean, c’est là 
tout mon héritage, mais je vous le donnerai de grand 
coeur si vous me promettez sincèrement de laisser 
reposer ce mort en paix. 
Si tu veux payer pour lui, répondirent ces mé- 
chants, nous ne lui ferons pas le moindre mal, tu 
peux y compter. 
Et ils s’emparèrent de Pargent que leur offrait 
Jean, puis quittérent l’église en riant malicieusement 
de sa bonté. Jean replaça le mort convenablement, 
lui joignit les mains sur la poitrine et lui dit adieu. 
Ensuite il quitta aussi la petite église, et le coeur 
content poursuivit son voyage au travers de l’épaisse 
forêt. Tout autour de lui, partout où les pâles 
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