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L’HISTOIRE D’UNE MÈRE. 187
plus merveilleuse. On voyait sous des cloches de cristal les
plus délicates hyacinthes, et à côté de grosses pivoines
vulgaires et bouffies. Il y avait aussi des plantes aquatiques,
les unes pleines de sève, d'autres à moitié flétries, et dont
les racines étaient entourées de vilaines couleuvres. Plus
loin s’élevaient de magnifiques palmiers, des chênes, des
platanes ; puis dans une autre région à l’écart se trouvaient
des pares de persil, de thym et les autres plantes pota-
gères, emblèmes du genre d'utilité de ceux dont elles sym-
bolisaient la vie. Il y avait encore de grands arbustes dans
des pots trop étroits qui paraissaient près d’éclater; mais on
voyait aussi de méchantes petites fleurettes dans des vases
de porcelaine, dans le meilleur terreau, entourées de mousse,
et soignées on ne peut mieux. Tout cela représentait la vie
des hommes qui dans ce moment existaient sur la terre,
depuis la Chine jusqu’au Groënland.
La vieille voulait expliquer tout cet arrangement mysté-
rleux, mais la mère ne l’écouta pas et demanda à être con-
duite auprès des toutes petites plantes; elle les tâtait et
palpait pour sentir les pulsations du cœur; après en avoir
touché des milliers, elle reconnut les battements du cœur de
son enfant.
« C’est lui! » s'écria-t-elle, en étendant sa main sur
un petit crocus qui, penché sur le côté. paraissait tout
flétri.
« Ne le touche pas, dit la vieille. Reste ici à cette place,
et quand la Mort va venir, elle ne saurait tarder, défends-lui
d'arracher cette plante; menace-la de déraciner toutes les
fleurs alentour. Elle aura peur; elle est responsable et en
rend compte au bon Dieu. Aucune plante ne doit être enlevée
avant qu’il l’ait permis. »